Bébés génétiquement modifiés
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En novembre 2018, la communauté internationale condamnait unanimement une expérience menée en Chine sur l'ADN de jumelles avant la naissance, au moyen des "ciseaux génétiques" CRISPR-Cas9, un système de manipulation génétique qui permet de "couper-coller" des branches d’ADN. Concrètement, les génomes de Lulu et Nana ont été modifiés au stade embryonnaire, afin de les protéger contre le Sida.
La quête de l'enfant parfait
Doter les bébés de "super-cerveaux", créer des surhommes à l'intelligence supérieure ? Ce rêve transhumaniste du "neuro-enhancement" est
bien réel en Chine, où la population, habituée à la politique de
l'enfant unique, serait plus encline à accepter l'idée d'une "amélioration" de l'homme, comme le suppose G. Owen Schaefer,
chercheur en éthique biomédicale, à l’Université nationale de
Singapour. Ainsi, même si l'expérience de He Jiankui fait l'objet d'une
enquête, et qu'elle a été officiellement condamnée comme irresponsable,
50% des jeunes Chinois souhaitent améliorer les capacités cognitives de
leurs enfants en utilisant les thérapies géniques, et les recherches sur
l'amélioration du QI fleurissent.
Au Beijing Genomics Institute (BGI), par exemple, des généticiens travaillent dans un "laboratoire de génomique cognitive", où ils séquencent le génome de milliers de surdoués (au QI de 160 et plus), afin de "trouver les racines génétiques" du génie. "Wang
Jian, le patron du BGI, est convaincu que cette recherche permettra aux
couples qui ont recours à la fécondation in vitro de sélectionner les
embryons les plus intelligents. Sur le long terme, le niveau de QI de la
population générale s'en trouverait amélioré", racontait en 2014 la
journaliste - sinologue Ursula Gauthier. En Chine, les débats éthiques
sont rares, indique-t-elle, et là-bas, peu s'indignent de tels projets -
sauf quand les médias étrangers s'en mêlent.
Alors qu’en Europe, le principe de précaution s’applique, et que de
nombreuses recherches menées ailleurs ne seraient pas possible au nom de
la bioéthique, il n’en est pas de même aux USA, où la liberté d’innover
est privilégiée - et encore moins en Chine, où les barrières aux
recherches en NBIC sont quasi-inexistantes, et où le régime dictatorial,
qui mise actuellement à fond sur les biotechnologies pour des raisons
économiques, peut aisément ignorer l'opinion et la pression
internationale. À noter que, tandis qu'en Chine, la quête de l'enfant
parfait pousse les généticiens, financés par le gouvernement fut-il le
rappeler, à modifier le génome d'embryons humains grâce à la technique
du CRISPR/Cas9, on constate aux USA un grand engouement pour les tests
d’analyse ADN. En outre, 72% des américains se disent favorables à une amélioration génétique sur un fœtus pour corriger une maladie… et ils sont aussi 19% à accepter cette modification si l'opération vise à améliorer le QI de l'enfant.
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