Effondrement des prix sur le marché mondial du lait, Industrie
Après deux années de hausse, la poudre a chuté de 41 % depuis le début de l'année.
Ce retournement brutal constitue une nouvelle donne pour les industriels.
« On s'attendait à un retournement du marché du lait, mais pas de façon aussi brutale », dit-on d'emblée chez Fonterra, le géant néo-zélandais, leader mondial de l'exportation de produits laitiers industriels et expert du marché européen. Amorcée au printemps, la baisse des cours mondiaux de la poudre de lait s'est vraiment accélérée au mois d'août, avec la décision de la Russie de fermer son marché aux produits alimentaires des pays ayant sanctionné Moscou en raison de sa politique ukrainienne.
En l'espace de huit mois, les cours mondiaux de poudre écrémée ont plongé de 41 %, à 2.000 euros la tonne. Une situation qui va amener les industriels à revoir à la baisse la rémunération des producteurs de lait. Au risque de provoquer quelques bras de fer. Certains groupes fromagers comme Bongrain (Caprice des Dieux) ont pris les devants. Début octobre, celui-ci a annoncé son intention de réduire, au quatrième trimestre, le prix aux producteurs de 14 euros par hectolitre dans le Sud-Ouest de la France. « Les économistes s'accordent pour prévoir une nette chute des prix au premier trimestre 2015 en France », soulignent les chambres d'agriculture.
La Russie, premier débouché
L'embargo russe a, à la fois, accéléré la chute des prix et désorganisé les flux commerciaux, notamment européens. La Russie était le premier débouché de l'industrie laitière européenne en 2013 pour une valeur de 1,5 milliard d'euros devant la Chine (1,3 milliard d'euros). A la différence de la Chine, grosse importatrice de poudre de lait, la Russie importe surtout du fromage d'Europe. « Quand les portes de la Russie se sont fermées, le Danemark a tenté de trouver preneur pour ses fromages en Finlande, mais la Finlande n'en a pas voulu », explique-t-on chez Fonterra. Frontalière de la Russie, la Finlande est le pays laitier européen qui a le plus souffert de l'embargo, selon les chambres d'agriculture. Elle y exporte en effet près d'un cinquième du lait (18,2 %) qu'elle produit, suivie de près par la Lituanie (17,7 %). « Certains groupes se sont retrouvés avec des lots entiers de fromages sur les bras parce qu'ils avaient déjà été étiquetés en russe », explique la coopérative néo-zélandaise. Face à cette situation, les industriels européens ont réduit leur production de fromage, qu'ils essaient de vendre sous forme de poudre, ce qui pèse d'autant plus sur les cours qu'ils anticipent une baisse plus forte dans les mois à venir.
L'embargo russe n'est pas seul responsable de la chute des prix. Celle-ci était prévisible avec la reprise de la production dans les grands pays laitiers, Argentine exceptée et la reconstitution des stocks en Europe. « Le dynamisme de l'offre est en train de prendre un poids démesuré sur le marché laitier, entraînant les cours vers le bas », écrivent les chambres d'agriculture