la livraison de drogue à domicile





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Les Inrocks - J’ai commandé de la MDMA en plongeant dans le deep web:



Un lundi soir de juillet. Oscar sert les bières le temps que Paul bidouille son mac. Il est 22 heures et les deux garçons de 26 ans s’apprêtent à passer commande pour les vacances. Voilà déjà six mois qu’Oscar a abandonné ses habitudes au coin de la rue. “J’en avais marre de me faire arnaquer par mon dealer qui me faisait des sachets de 800 milligrammes de cocaïne que je payais 1 gramme”. Il décide alors de se tourner vers le deep web.
Le deep web, c’est la face cachée d’Internet. La partie immergée de l’iceberg inaccessible par l’internaute lambda, cantoné à surfer sur moins de 20% des pages web existantes. Impossible en effet d’accéder au deep web par les moteurs de recherche traditionnels : la plupart des URL n’ont pas le bon format pour être indéxées, voire sont carrément planquées par leurs créateurs. L’objectif? Anonymiser entièrement sa balade sur le web sans se faire repérer par les autorités. Exit donc Google, Yahoo et compagnie : pour entrer dans les profondeurs du web, le sésame s’écrit TOR.
Oscar tend les pintes. “Branche la clé USB”. Paul est venu configurer son ordinateur pour la première fois. Il a envie d’essayer la livraison de drogue à domicile. “Dès l’allumage de ton ordinateur, tu bootes à partir d’une clé USB ou d’un CD avec un autre système d’exploitation, Tails. C’est comme Windows sauf que là tout est pré-configuré. Bien sûr il y a TOR pour naviguer sans être tracé, mais aussi des logiciels de cryptage”, explique Oscar.
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TOR, ou plutôt “The Onion Router”, est un navigateur qui fonctionne par réseau d’ordinateurs : lorsqu’un internaute veut se connecter à un site, ses données passent par de multiples points du réseau – à Moscou, Los Angeles, Lima…, chaque étape constituant une couche de cryptage. La connexion est alors intraçable (on ne sait pas qui se connecte, ni de quel ordinateur). Il devient quasiment impossible de lire le contenu de la discussion. “Au départ, je l’ai installé pour voir ce que c’était, raconte Oscar. Je suis pas un geek mais je m’en suis sorti tout seul en lisant des tutoriels. Au fond, c’est pas si compliqué”.
Étape 1 : se procurer des bitcoins
Une fois que Paul a installé ces outils, le shopping peut commencer. Étape numéro 1 : se procurer des bitcoins, cette monnaie virtuelle qui permet de régler ses achats sans donner sa véritable identité. L’opération en elle-même est parfaitement légale et peut s’effectuer sur le clear web (il existe des “banques” spécialisées). Toutefois elle reste traçable. Pour moins exposer son identité, Oscar préfère acheter des bitcoins à un particulier via une plateforme d’échange. Son site préféré s’appelle Local bitcoins. “Aujourd’hui un bitcoin équivaut à 457,25 euros. Ça peut varier sans prévenir d’un jour à l’autre parce que ce n’est pas une monnaie adossée à une banque centrale et des mécanismes de régulation. Il faut vite dépenser sinon tu risques de perdre ton capital”, conseille Oscar.
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Le grand blond montre à Paul la marche à suivre : sur local bitcoins, une liste de vendeurs s’affiche, ils proposent tant de coins avec telle méthode de paiement. Une fois que Paul fait son choix, local bitcoins agit comme un tiers de confiance : il bloque la quantité de coins désirée pendant 24 ou 48 heures le temps que Paul vire une centaine d’euros sur le compte du vendeur. Évidemment là, difficile de cacher sa vraie identité puisque la transaction se fait via un virement bancaire classique. Une fois le virement reçu, le vendeur le confirme sur le site et celui-ci relâche les bitcoins bloqués vers le compte de Paul.
Étape 2 : blanchir les bitcoins
Une fois les bitcoins dans la poche, il faut maintenant les blanchir. Rendez-vous sur bitblender. L’idée : faire en sorte qu’il ne subsiste aucun lien traçable entre vous et vos bitcoins. “Dis-toi que tu mets tes bitcoins dans un énorme tas de pièces, qu’on mélange le tout et que tu y repioches au hasard ta somme de départ : tu récupères le même nombre de pièces, mais ce ne sont pas les tiennes. Elles ne sont plus liées à toi”, sourit Oscar. Pour brouiller davantage les pistes, on retire en deux fois la somme nécessaire pour son achat. Histoire d’éviter que les autorités ne remontent le fil des transactions. Car même si on ne sait pas qui se cache derrière chacun des comptes bitcoins, tous les échanges sont consignés. Ensuite, on stocke ses bitcoins tout neufs sur une clé USB, une “banque” ou un site d’échange, ou carrément sur Silk Road, la plateforme d’achat des drogues.
L’échalas se lève et farfouille dans une boîte noire dont il sort un post-it griffonné. Tous ses mots de passe, site par site. Il entre ses codes pour accéder à sa session sur Silk Road. Il a transféré il y a quelques jours 0,31 bitcoin, soit 150 euros environ. Sueurs froides : la somme n’apparaît pas. Oscar réactualise son compte. Ouf, tout est dans l’ordre. “Il y a beaucoup d’histoires d’arnaques sur le deep web, on flippe toujours un peu”.
Étape 3 : choisir ses produits sur Silk Road
Le supermarché des stupéfiants nous ouvre ses portes. Fermé en 2013 par le FBI avant d’être réouvert un mois plus tard, Silk Road affiche son engagement politique dès sa page d’accueil : “Nous sommes ici pour en terminer avec la guerre injuste contre les drogues. Silk Road n’est pas un marché, Silk Road est une révolte mondiale”. Et les outils de la révolution sont nombreux : opiacés, stimulants, ecstasy, cannabis… de quoi satisfaire toutes les insurrections.
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Paul parcourt la page ecstasy. Les drogues de synthèse? Très peu pour lui. “J’ai besoin de savoir ce que je consomme, la provenance du produit, et la réputation du vendeur. Le problème des drogues de synthèse, c’est que c’est trop nouveau, on a aucun recul contrairement au LSD, à la coke, qui sont consommées depuis des dizaines d’années. Il faut être responsable, connaître les risques : tu peux crever avec ces trucs”.
Ça tombe bien, les vendeurs sont notés par les consommateurs, ainsi de Fred the baker ou de Lost Heaven auréolés de 5 étoiles et de commentaires dithyrambiques. Paul pourra aussi y aller de sa petite note après l’achat. Côté prix, on est bien en deçà de ce que propose le marché de la rue : 60 euros le gramme de MDMA à Paris, 20 euros sur Silk Road. Et les bonnes affaires sont légion : pour 10g de MD achetés, le gramme tombe à 14 euros. Pareil pour la méphédrone, la coke ou la kétamine. “À ce prix là, t’as envie de tout essayer”, rigole Oscar. Quand il voit une drogue qu’il ne connaît pas, il se réfère notamment à Erowid, genre d’encyclopédie géante où la plupart des substances sont répertoriées et analysées.
Paul opte pour un gramme de MDMA et un vendeur 5 étoiles. Il doit désormais donner ses coordonnées postales. Pour éviter qu’elles ne soient interceptées, il utilise une clé PGP – pour Pretty Good Privacy, qui permet à deux interlocuteurs de communiquer en privé. “C’est comme si tu écrivais ton adresse sur un bout de papier que tu mettais dans une boite, que tu la refermais avec un cadenas, et que seul ton interlocuteur ait la clé pour l’ouvrir”, image Oscar.
Après tu reçois tes produits dans une enveloppe normale, le sachet planqué dans un plastique noir collé à des feuilles de papier blanc”, illustre t-il. Indétectable pour les douaniers. Parfois, les vendeurs font preuve d’originalité à l’instar de ce Néerlandais qui envoie des CDs de rnb des années 1990 avec la dope collée sous la tranche noire du compact-disc. “Je sais pas si c’est de vrais groupes de merde ou s’ils ont été créés pour ça ! Tu te retrouves parfois avec des faux noms de label”, se marre encore Oscar. Au total, l’opération bitcoin + achat + livraison prend une quinzaine de jours. Oscar sourit : juste le temps qu’il lui faut pour partir en vacances.




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