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Human Brain Project, un grand projet européen sur le cerveau humainJean-Paul Baquiast, Christophe Jacquemin - 09/02/2013
Il serait mal venu de critiquer la décision des autorités européennes ayant accordé un important budget à l'Human Brain Project, dans le cadre du FET (Future and Emergent Technologies). Ce projet vise à rassembler et dynamiser un ensemble de recherches sur le cerveau humain et sur les applications technologiques pouvant déboucher sur ce que l'on qualifie de "cerveau artificiel". Cette décision s'imposait. Les grands Etats, principalement les Etats-Unis, mais aussi la Chine et quelques autres, y consacrent des crédits importants. Ils opèrent de façon explicite, dans un cadre universitaire ouvert. Mais ils le font aussi, et le plus souvent, dans le cadre de laboratoires et d'entreprises assujettis au secret-défense. Leurs investissements leur donnent des compétences exclusives que l'on retrouve déjà non seulement dans le domaine militaire mais aussi dans le domaine civil, avec l'objet de faire face à certains troubles mentaux, développer divers types de robots autonomes susceptibles de compléter ou remplacer les humains, mieux comprendre (pour mieux les piloter) les réactions des individus ou des groupes face aux campagnes publicitaires et politiques...
L'Europe, en matière de sciences du cerveau, qu'il soit biologique ou artificiel, n'a certainement pas l'avance des Etats-Unis. Pour s'en convaincre, il suffit de parcourir la bibliographie jointe au dernier ouvrage de Ray Kurzweil consacré au thème du cerveau artificiel : "How to create a Mind". Mais l'Europe dispose cependant d'un grand nombre de laboratoires et de chercheurs de haut niveau sur ces sujets. Ceux-ci souffrent cependant d'une certaine dispersion, d'une mauvaise reconnaissance sociale et donc d'un grand manque de ressources. Tous se réjouiront donc de l'annonce de l'Human Brain Project.
Cependant, des réserves et demandes d'éclaircissement se sont exprimées. Le Human Brain Project a d'abord paru n'être qu'une extrapolation du Blue Brain Project, conduit à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) sous la responsabilité du chercheur Henry Markram. Ce dernier projet vise à simuler l'anatomie et le fonctionnement d'une mini-colonne corticale de rat sur un super-ordinateur IBM. Rien de plus légitime, mais il paraissait difficile d'espérer extrapoler ses résultats à la simulation du cerveau entier de cet animal, et moins encore à la compréhension de son comportement global dans son milieu. A fortiori, il aurait été hasardeux d'en étendre les résultats au cerveau humain, comme Henry Markram en aurait exprimé l'ambition.
En fait, même si Henry Markram et l'EPFL conserveront un rôle éminent dans le nouveau projet, à la naissance de laquelle ils ont beaucoup oeuvré, il semble que les nombreux candidats attirés par l'ampleur et les ressources de l' Human Brain Project s'efforceront d'y mettre leur touche. Si Henry Markram demeurera - semble-t-il - le grand responsable de l'ensemble, il a été annoncé cependant qu'il n'exercerait de compétence directe que sur 20% de celui-ci.
Reste à savoir comment s'organisera l'espèce d'Académie des sciences du cerveau qui devrait se mettre en place, comparée par d'aucuns à une sorte d'usine à gaz. Un premier rapport d'une centaine de page, remis à la Commission européenne en avril 2012, a été rendu public récemment. Plus explicite encore, un site consacré au projet vient d'être ouvert. On y trouve une quantité considérable de contributions et de propositions, exposant les tenants et aboutissants espérés du projet. Il faut lire ces documents pour juger de l'ampleur des ambitions et aussi des difficultés qui vont être rencontrées. Celles-ci surviendront au fur et à mesure des premiers résultats.
Il est difficile aujourd'hui d'anticiper l'avenir du projet au-delà de quelques mois compte tenu du fait qu'il doit se dérouler sur une décennie, voire plus. Il est évident que très rapidement les connaissances et les technologies évolueront, sans mentionner l'environnement économique et politique de l'opération. La capacité d'adaptation sera vitale.
Il est difficile aujourd'hui d'anticiper l'avenir du projet au-delà de quelques mois compte tenu du fait qu'il doit se dérouler sur une décennie, voire plus. Il est évident que très rapidement les connaissances et les technologies évolueront, sans mentionner l'environnement économique et politique de l'opération. La capacité d'adaptation sera vitale.
Un cerveau dans le cerveau
C'est d'ailleurs à une véritable nouvelle science de la gestion d'un projet complexe évolutionnaire impliquant des disciplines très différentes qu'il conviendra de s'attaquer en priorité. On pourrait parler de la nécessité de construire un cerveau dans le cerveau. Une table ronde organisée le 8 février par France-Culture, sous la responsabilité de Michel Alberganti, a évoqué ce point. Tout ou presque sera à construire dans ce dernier domaine de la gestion de projet réparti. Pour que le grand public cautionne l'entreprise et s'y implique, certains participants, dont l'un des rédacteurs de cet éditorial, ont insisté sur la nécessité de procéder dans l'esprit des logiciels libres : offrir le plus tôt possible à des développeurs éventuellement bénévoles la possibilité de disposer de plates-formes où implémenter des expériences ou mini-systèmes qui contribueront à l'enrichissement de la démarche d'ensemble. Les discussions éthiques prévues par le projet ne trouveront de substances réelles, chez les citoyens, qui si de telles démarches sont mises à leur disposition. Nous nous efforcerons pour notre part de rendre compte des informations qui nous parviendront sur ces divers sujets.
Tout ceci permettra peut-être d'entrouvrir quelque peu l'épais mystère dont s'entourent les agences de recherche militaires sur ces sujets, ou simplement des firmes bien connues dont l'ambition est de capter les cerveaux des individus en leur imposant des contenus favorisant leurs stratégies. Il ne faut pourtant pas se faire d'illusions. Les très nombreux scientifiques européens identifiés et soutenus dans le cadre du projet Human Brain seront contactés et pour certains récupérés par la recherche militaire américaine. Nous avons connus quelques thésards, des plus prometteurs, qui ont été attirés aux Etats-Unis et qui depuis n'ont plus donné signe de vie.
Ainsi va l'intelligence économique.
Ainsi va l'intelligence économique.
© Automates Intelligents